Syntropie et permaculture sont deux approches agricoles qui visent à harmoniser les activités humaines avec la nature pour créer des systèmes durables et abondants. Bien que partageant des objectifs similaires, elles se distinguent par leurs principes et méthodes spécifiques. Cet article explore les différences et les points communs entre syntropie et permaculture, en mettant en lumière leurs particularités respectives.
Comprendre la syntropie
La syntropie est une approche agricole développée par Ernst Götsch, un agriculteur et chercheur suisse né en 1948 à Raperswilen, en Suisse. Dans les années 1980, Götsch a émigré au Brésil, s’installant dans une ferme dégradée du sud de Bahia. Face à la dégradation des sols due à des pratiques agricoles intensives, il a mis au point une méthode innovante visant à régénérer rapidement les sols et à restaurer les écosystèmes naturels. Son objectif principal était de créer des systèmes agricoles qui imitent les processus naturels, favorisant ainsi une production abondante tout en améliorant la fertilité du sol et la biodiversité. Cette approche, connue sous le nom d’agriculture syntropique, a permis de transformer des terres autrefois stériles en forêts productives, démontrant le potentiel de la syntropie pour restaurer les écosystèmes dégradés.
Les principes fondamentaux de la syntropie
La syntropie repose sur plusieurs principes clés qui visent à reproduire et à accélérer les processus naturels pour créer des systèmes agricoles durables. Parmi ces principes, la stratification consiste à organiser les plantes en différentes couches, ou strates, en fonction de leur hauteur et de leurs besoins en lumière, maximisant ainsi l’utilisation de l’espace vertical.
La succession fait référence à la planification de la séquence de plantation des espèces, en tenant compte de leur cycle de vie et de leur rôle dans l’écosystème, afin de favoriser une évolution naturelle et dynamique du système.
La perturbation, ou taille régulière, est une pratique essentielle en syntropie : en élaguant les plantes de manière stratégique, vous stimulez leur croissance, vous augmentez la production de biomasse et vous enrichissez le sol en matière organique. Ces techniques combinées permettent de créer des écosystèmes agricoles résilients, productifs et en harmonie avec la nature.
Comprendre la permaculture
La permaculture est un concept développé dans les années 1970 par les Australiens Bill Mollison et David Holmgren. Le terme « permaculture » est une contraction de « permanent agriculture » et « permanent culture », reflétant une vision d’une agriculture durable intégrée à une culture humaine durable. Mollison, biologiste et écologiste, et Holmgren, alors étudiant, ont collaboré pour élaborer un système de conception holistique visant à créer des environnements humains durables en s’inspirant des écosystèmes naturels. Leur travail a conduit à la publication de « Permaculture One » en 1978, ouvrage fondateur qui a introduit le concept au grand public.
La permaculture englobe non seulement les pratiques agricoles, mais aussi la conception de l’habitat, la gestion de l’eau, l’utilisation des ressources énergétiques et la structuration sociale, dans le but de créer des systèmes résilients et autosuffisants.
Les principes éthiques en permaculture
Au cœur de la permaculture se trouvent trois éthiques fondamentales qui guident sa pratique :
- Prendre soin de la Terre ;
- Prendre soin des êtres humains ;
- Partager équitablement les ressources.
Ces éthiques servent de base à une série de principes de conception destinés à guider les praticiens dans la création de systèmes durables. Parmi ces principes, on trouve l’observation et l’interaction avec la nature, la valorisation et l’utilisation des ressources renouvelables, la production de zéro déchet, la conception de systèmes intégrés et l’utilisation de solutions petites et lentes. En appliquant ces principes, la permaculture vise à créer des environnements qui répondent aux besoins humains tout en renforçant la santé et la résilience des écosystèmes naturels. Cette approche holistique encourage une relation symbiotique entre les personnes et leur environnement, favorisant une culture de durabilité et d’abondance.
Syntropie et permaculture : leurs différences et points communs
Une approche globale contre une approche plus spécifique
La permaculture adopte une approche holistique qui englobe divers aspects de la vie humaine, tels que l’agriculture, l’architecture, la gestion de l’eau et le développement communautaire. Elle vise à créer des systèmes durables en intégrant harmonieusement les activités humaines dans leur environnement naturel. En revanche, la syntropie se concentre spécifiquement sur la production agricole en s’inspirant des processus naturels pour restaurer et améliorer les écosystèmes.
Bien que partageant des objectifs communs de durabilité et de respect de la nature, la permaculture propose un cadre de conception global, tandis que la syntropie offre une méthodologie précise axée sur la régénération des sols et la production alimentaire. Ainsi, la permaculture peut être considérée comme une philosophie de vie englobant plusieurs domaines, alors que la syntropie se focalise sur des pratiques agricoles spécifiques visant à créer des systèmes agricoles productifs et résilients.
L’organisation en strates : 4 en syntropie, 7 en permaculture
Dans la permaculture, les plantes sont organisées en sept strates basées sur leur hauteur et leur fonction au sein de l’écosystème. Ces strates comprennent :
- La canopée (arbres de grande taille) ;
- Les arbres de petite taille ;
- Les arbustes ;
- Les herbacées ;
- Les couvre-sols ;
- Les plantes grimpantes ;
- Les racines et plantes souterraines.
Cette classification vise à maximiser l’utilisation de l’espace vertical et à favoriser la biodiversité. En syntropie, l’organisation des plantes repose sur quatre strates principales, définies en fonction de leurs besoins en lumière :
- Strate émergente ;
- Strate haute ;
- Strate moyenne ;
- Strate basse.
Cette approche permet d’optimiser la photosynthèse et de créer des systèmes agricoles denses et productifs. Par exemple, une plante comme le thym, qui reste de petite taille, serait classée en strate herbacée en permaculture en raison de sa hauteur, mais en strate haute en syntropie en raison de son besoin élevé en lumière. Ainsi, bien que les deux approches utilisent le concept de strates pour organiser les plantes, leurs classifications diffèrent en fonction des critères privilégiés : la hauteur et la fonction en permaculture, les besoins en lumière en syntropie.
Les techniques de gestion de la biomasse
La perturbation en syntropie
En syntropie, la perturbation est une technique essentielle qui consiste en une taille régulière et intensive des plantes. Cette pratique vise à stimuler la croissance végétative, à augmenter la production de biomasse et à enrichir le sol en matière organique. En élaguant stratégiquement les plantes, vous favorisez la régénération rapide des tissus végétaux et créez un microclimat propice au développement des espèces cultivées.
Par ailleurs, la biomasse issue de ces tailles est laissée sur place, formant un paillis naturel qui protège le sol, conserve l’humidité et fournit des nutriments lors de sa décomposition. Cette approche dynamique permet de reproduire les cycles naturels de succession écologique, accélérant ainsi la restauration des sols dégradés et la création d’écosystèmes agricoles résilients et productifs.
Le « chop and drop » en permaculture
En permaculture, la technique du « chop and drop » consiste à couper les plantes, notamment les engrais verts ou les plantes de couverture, et à les laisser sur place pour nourrir le sol. Cette méthode permet de créer un paillis naturel qui protège le sol de l’érosion, conserve l’humidité et enrichit la terre en matière organique lors de la décomposition des végétaux.
Le « chop and drop » favorise également la biodiversité en fournissant un habitat pour divers organismes bénéfiques. Comparée à la perturbation en syntropie, cette technique est moins intensive et s’inscrit dans une approche plus passive de gestion de la biomasse. Alors que la syntropie implique une intervention humaine régulière pour optimiser la croissance des cultures, la permaculture privilégie des méthodes qui laissent davantage la nature opérer, tout en soutenant les processus écologiques par des interventions ponctuelles et réfléchies.
Un agenda de plantation qui diffère
En syntropie, la planification initiale est essentielle : toutes les plantes du système sont installées simultanément, dès le début. Cette approche permet de reproduire les dynamiques naturelles de succession écologique, où différentes espèces coexistent et interagissent dès les premières étapes du développement de l’écosystème. En plantant immédiatement une diversité d’espèces occupant diverses strates, vous favorisez une occupation optimale de l’espace et une synergie entre les plantes, ce qui accélère la régénération du sol et la productivité du système.
À l’inverse, en permaculture, l’établissement des plantes se fait de manière plus progressive. Les espèces sont introduites au fil du temps, en tenant compte de l’évolution du système et des interactions qui se développent. Cette méthode permet d’observer les besoins spécifiques de chaque plante et d’ajuster les plantations en conséquence, favorisant ainsi une adaptation continue et une résilience accrue du système. Cette progression graduelle facilite également l’intégration de nouvelles espèces en fonction des conditions changeantes du site et des objectifs du jardinier.
Adaptez la syntropie et la permaculture à votre jardin ou verger
Les climats tempérés de la France offrent un terrain propice à l’intégration de la syntropie et de la permaculture dans vos jardins et vergers. Ces approches, bien que développées sous des latitudes différentes, peuvent être adaptées pour créer des écosystèmes résilients et productifs.
En permaculture, vous concevez votre espace en tenant compte des microclimats, de la topographie et des espèces locales, plantez des haies brise-vent pour protéger vos cultures, utilisez des buttes pour améliorer le drainage et favorisez la biodiversité en associant différentes plantes. Ces pratiques permettent de créer un environnement harmonieux et durable.
Pour la syntropie, vous adaptez les principes de stratification et de succession aux conditions locales. Par exemple, vous associez des arbres fruitiers à des arbustes et des plantes herbacées en fonction de leurs besoins en lumière et de leur cycle de croissance. La taille régulière des plantes, suivie du paillage avec la biomasse obtenue, enrichit le sol et favorise la rétention d’eau, essentielle en période de sécheresse. Cette méthode, bien que nécessitant une connaissance approfondie des espèces et une planification minutieuse, est tout à fait applicable aux jardins et vergers français.
En combinant syntropie et permaculture, vous créez un jardin ou un verger qui non seulement répond à vos besoins alimentaires, mais contribue également à la régénération des sols et à la préservation de la biodiversité locale.
Les avantages pour les jardiniers amateurs
Adopter la syntropie et la permaculture dans votre potager présente de nombreux bénéfices. Ces méthodes augmentent la biodiversité, attirant une faune bénéfique qui contribue à la pollinisation et au contrôle des ravageurs. Elles réduisent également les besoins en eau grâce à des techniques de paillage, à une terre plus riche qui retient l’eau et à une couverture permanente du sol qui limite l’évaporation. De plus, en favorisant des sols vivants et fertiles, ces approches permettent une production alimentaire durable, vous offrant des récoltes abondantes tout en respectant l’environnement. Ainsi, même en tant que jardinier amateur, vous pouvez contribuer à un écosystème plus sain et résilient.
« Syntropie : le guide pratique pour sublimer votre potager »
Le prochain ouvrage des éditions Orca sera consacré à la syntropie et à la façon de l’utiliser concrètement pour le potager des particuliers. Ce guide pratique sera disponible dans le courant du mois de mars.
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Plus d’informations dans l’article « Comprendre le concept de la syntropie pour une agriculture novatrice ».
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